Non pas des serviteurs inutiles mais plutôt des serviteurs sans mérite particulier

Dans Luc 17:10 nous lisons dans plusieurs traductions que Jésus ordonne à ses disciples de se dire qu’ils sont des serviteurs inutiles

Luc 17:10 Vous de même, quand vous avez fait tout ce qui vous a été ordonné, dites: Nous sommes des SERVITEURS INUTILES, nous avons fait ce que nous devions faire. (Segond 1910)

C’est plutôt étonnant parce qu’on lit ailleurs dans 1Corinthiens 15:58 que le travail dans le Seigneur n’est pas vain. Quand on semble se trouver devant une contradiction, il est bon de regarder d’autres traductions. Semeur emploie

Luc 17:10 Il en est de même pour vous. Quand vous aurez fait tout ce qui vous est commandé, dites: « Nous ne sommes que des SERVITEURS SANS MÉRITE PARTICULIER; nous n’avons fait que notre devoir. » (Semeur)

Luc 17:10 De même, vous aussi, quand vous avez fait tout ce qui vous était ordonné, dites: Nous sommes des SERVITEURS QUELCONQUES. Nous avons fait seulement ce que nous devions faire. (TOB)

Luc 17:10 Il en va de même pour vous: quand vous aurez fait tout ce qui vous est ordonné, dites: Nous sommes de SIMPLES SERVITEURS; nous n’avons fait que notre devoir. (Français courant)

Luc 17:10 eimaste APLOI DOULOI (grec démotique moderne : dites : nous sommes de simples serviteurs)

On conviendra qu’il y a une bonne différence entre dire que nous sommes des serviteurs inutiles et des simples serviteurs sans mérite particulier, car en effet, tout est grâce dans la vie chrétienne, il n’y a aucun mérite de notre part pour jouir des privilèges que le salut en Jésus nous offre, c’est par la foi que nous pouvons y accéder. Le fait que Jésus veut que ses disciples ajoutent qu’ils avaient fait seulement que leur devoir est un signe aussi que leur service n’était pas inutile. Dieu n’exige pas de nous que nous fassions des choses inutiles, ce serait méchant de sa part!

Regardons maintenant le sens du mot grec «achreios» qui est traduit si différemment. La première chose à noter, c’est que ce mot se retrouve ailleurs seulement dans Matthieu 25:30 Et le serviteur inutile, jetez-le dans les ténèbres du dehors, où il y aura des pleurs et des grincements de dents. Cela ne nous contribue pas à en établir le sens, car c’est impensable que Jésus veuille que ses apôtres se considèrent comme celui qui avait enterré son talent d’or au lieu de le faire fructifier comme les autres. Je parle en détail sur la page suivante de la distinction entre le contexte des deux endroits où on parle du serviteur inutile.

Ici, pour ne pas faire trop long, je vais me contenter de souligner que nous avons une autre carte dans notre jeu pour nous aider à établir son sens. Il s’avère que «achreios» est un mot composé d’une négation «a» et de «chreia». Or «chreia» est employé quelque fois dans le Nouveau Testament, il va donc nous aider à cerner le sens de «achreios» puisqu’il est son antonyme. Le mot «chreia» parle d’un besoin ou d’une nécessité. Bien entendu, on peut qualifier les besoins et les nécessités comme des choses étant utiles.

Quand David et ses amis ont eu faim, c’était nécessaire pour eux de manger, s’ils avaient eu le ventre plein, cela n’aurait pas été nécessaire. Ils auraient vu les pains comme de la simple nourriture, sans y porter attention.

Marc 2:25 Jésus leur répondit: N’avez-vous jamais lu ce que fit David, lorsqu’il fut dans la nécessité (chreia) et qu’il eut faim, lui et ceux qui étaient avec lui; comment il entra dans la maison de Dieu, du temps du souverain sacrificateur Abiathar, et mangea les pains de proposition, qu’il n’est permis qu’aux sacrificateurs de manger, et en donna même à ceux qui étaient avec lui!

Marie avait choisi la bonne part, celle qui était nécessaire, Marthe avait choisi la part qui n’était pas nécessaire à ce moment. Servir aux tables pour Jésus était loin d’être inutile mais ce n’était pas ce qui était nécessaire à ce moment-là, le besoin de Marthe était d’être enseigner par Jésus et Marie l’avait compris.

Luc 10:42 Une seule chose est nécessaire (chreia). Marie a choisi la bonne part, qui ne lui sera point ôtée.

Les justes se comportent bien, ils n’ont pas besoin de se repentir, ce n’est pas une nécessité pour eux, mais ça l’est pour ceux qui se comportent mal, signe que la repentance n’est pas inutile, au contraire, elle est nécessaire pour le pécheur.

Luc 15:7 De même, je vous le dis, il y aura plus de joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se repent, que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n’ont pas besoin (chreia) de repentance.

Voici le contexte dans lequel Jésus a dit à ses disciples de se percevoir comme des simples serviteurs sans mérite particulier.

Luc 17:3 Prenez donc bien garde à vous-mêmes! Si ton frère s’est rendu coupable d’une faute, reprends-le et, s’il change d’attitude, pardonne-lui.

Jésus venait de leur dire qu’il fallait pardonner autant de fois que le frère pèche s’il se repent.

Luc 17:4 Et même s’il se rend coupable à ton égard sept fois au cours de la même journée, et que sept fois il vienne te trouver en disant qu’il change d’attitude, pardonne-lui.

Les apôtres y ont vu un défi pour leur foi.

Luc 17:5 Les apôtres dirent au Seigneur: Augmente notre foi.

Mais Jésus dit qu’une grande foi n’a rien à y voir

Luc 17:6 Si vraiment vous aviez la foi, leur répondit le Seigneur, même aussi petite qu’une graine de moutarde, vous pourriez commander à ce mûrier-là: « Arrache tes racines du sol et va te planter dans la mer » et il vous obéirait.

C’est plutôt une question d’obéissance à l’ordre que Jésus donne à ses serviteurs laboureurs qui sèment la Parole de Dieu et à ses serviteurs bergers qui s’occupent des brebis.

Luc 17:7 Supposons que l’un de vous ait un serviteur occupé à labourer ou à garder le troupeau. En le voyant rentrer des champs, lui direz-vous: « Viens vite, assieds-toi à table »? 8 Ne lui direz-vous pas plutôt: « Prépare-moi mon dîner, mets-toi en tenue pour me servir, jusqu’à ce que j’aie fini de manger et de boire; ensuite tu mangeras et tu boiras à ton tour »? 9 Le maître doit-il une reconnaissance particulière à cet esclave parce qu’il a fait ce qui lui était commandé? Bien sûr que non!

En plus, Jésus souligne que ses apôtres ne doivent pas s’attendre à des applaudissements de sa part parce qu’ils ont pardonné plusieurs fois au même frère. Ils ont simplement fait ce qu’il leur demande, comme tout disciple se doit de se comporter envers son maître. Ils ne sont que de simples serviteurs, sans mérite particulier à qui on a fait la grâce de servir le Messie en personne.

Luc 17:10 Il en est de même pour vous. Quand vous aurez fait tout ce qui vous est commandé, dites: « Nous ne sommes que des SERVITEURS SANS MÉRITE PARTICULIER; nous n’avons fait que notre devoir. » (Semeur)

Vous voyez que c’est bien différent de dire aux disciples qu’ils sont des serviteurs inutiles, ce qui revient à dire qu’ils ne servent à rien, s’ils n’étaient pas là, ça ferait pareil.

Dieu n’a pas absolument besoin de nous, nous ne sommes pas en tant que personnes des incontournables, si nous refusons de faire notre devoir, Dieu va simplement en appeler un autre pour le faire et c’est nous qui serons perdants dans l’affaire, comme la reine Vasthi au profit d’Esther.

Jésus avait révélé à Reinhardt Bonnke qu’il était son septième choix pour aller porter l’évangile en Afrique, mais les six autres avant lui avaient refusé d’y aller. Judas a refusé d’entrer dans son appel pour s’asseoir sur l’un des douze trônes qui lui était destiné dans le millénium (Matthieu 19:28), alors un autre a pris sa place, comme cela avait été prophétisé (Actes 1:15-26).

Remarquons aussi que Jésus dit que ce sont ses disciples qui ne sont pas nécessaires, et non ce qu’il leur demande de faire prêcher la bonne nouvelle du royaume de Dieu. Leur travail avait de la valeur dans le Seigneur, le royaume de Dieu s’était approché de la terre grâce à leur obéissance, ils accomplissaient des exploits au nom de Jésus, chassant des démons et guérissant des malades. Jésus avait fait remarquer à ses disciples que s’ils ne faisaient pas leur devoir de pardonner, Dieu ne leur pardonnera pas non plus, cf. Matthieu 6:15.

Application pour nous-mêmes

C’est nous-mêmes qui ne sommes pas nécessaires, ce n’est pas notre travail! Nous sommes de simples serviteurs qui faisons un travail nécessaire, essentiel pour l’avancement du royaume de Dieu, mais nous sommes aussi en même temps des serviteurs sans mérite particulier dont Dieu peut se passer et aller en choisir d’autres si nous refusons d’obtempérer ou si notre course terrestre est terminée et que nous sommes prêts à passer le flambeau à la génération suivante.

J’avais fait une autre méditation plus courte sur le même sujet ici.

Et voici une autre méditation plus détaillée. Le serviteur inutile de Luc 17 n’est pas le serviteur inutile de Matthieu 25 !



mars 25, 2023

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