Le combat contre l’acédie

Selon Évagre le pontique (346-399), l’acédie est l’une des huit pensées à combattre sur le plan spirituel. En voici la description prise sur wikipedia :

L’acédie est un mal de l’âme qui s’exprime par l’ennui, le dégoût pour la prière, la pénitence, la lecture spirituelle. L’acédie peut être une épreuve habituellement passagère, mais peut être aussi un état de l’âme qui devient une véritable torpeur spirituelle et la replie sur elle-même. C’est alors une maladie spirituelle.
L’acédie correspond à un concept moral, ascétique et psychologique qui a pris des sens très différents selon les cultures et les contextes dans lesquels il est utilisé. Il importe donc de ne pas opérer d’amalgames indus et de situer précisément le cadre historique dans lequel il est utilisé.
Étymologiquement, akêdéia signifie en Grec ancien : négligence, indifférence. Ce nom appartient à la famille du verbe akêdéo, qui veut dire « ne pas prendre soin de ». On a l’image de quelqu’un qui néglige de prendre soin de lui-même, et finit par se désintéresser de tout.
Le concept d’acédie est des plus anciens : Évagre le Pontique au IVe siècle, puis Jean Cassien au Ve siècle, en tracèrent ainsi les premiers portraits – comme une espèce de « torpeur spirituelle » caractérisant ceux qui, par découragement, ne s’empressent plus à prier Dieu. Ce qui pour autant ne signifie pas simplement le développement d’un abattement léthargique, d’un état de paresse ou de passivité prostrée, teintée de tristesse ; le mal décrit comprend au contraire également, paradoxalement, des états de suractivité, d’agitation, de fébrilité physique et mentale. Ambiguïté du tableau donc, pleinement assumée, qui ne fait que fidèlement refléter, selon Évagre, les contradictions de l’acédie – entrelacement complexe de dynamiques contraires : « l’acédie est un mouvement simultané, de longue durée, de l’irascible et du concupiscible, le premier étant furieux de ce qui est à sa disposition, le dernier languissant après ce qui ne l’est pas »…
« L’acédie est donc d’abord un vice monastique. Cassien lie l’acédie à la tristesse qui empêche toute contemplation. Ce vice offre de multiples rejetons : l’oisiveté, la somnolence, l’inquiétude, le vagabondage de l’esprit, la verbosité et la curiosité. L’instrument de lutte contre ce vice est donc le travail manuel. Vice instable, absorbé par la tristesse dans les réflexions théologiques, elle apparaît vite comme obsolète pour Grégoire le Grand, mais les écrits monastiques perpétuent sa présence comme « rébellion du corps aux contraintes auxquelles il est soumis à l’intérieur du monastère » (Pierre Damien). Faiblesse du corps pour les uns, elle est faiblesse de l’esprit pour d’autres comme Bernard de Clairvaux et Adam Scot qui la comprennent comme « une interruption du chemin de perfection sur lequel s’est engagé le moine ». Thomas d’Aquin pose les enjeux de manière efficace en posant la question des causes : l’acédie est à envisager différemment selon que son origine est louable (s’attrister de ses péchés) ou blâmable (convoiter un bien impossible).
Dès le XIIIe siècle l’acédie devient un vice commun et non plus spécifiquement monastique. L’acédie laïque est différente de la monastique : oisiveté, indolence, paresse, sont plus visibles et plus blâmables que la tristesse du moine. Les textes pastoraux, sermons d’éducation, prédications, utilisent ce thème aux XIV°-XV° siècles, jusqu’à son entrée dans les textes laïcs où elle est vue en termes de langueur, amertume et ennui : son entrée dans le cercle laïc modifie l’acédie en mélancolie. Paresse chez les moines, mélancolie chez les laïcs : ce vice, considéré comme trop instable, est écarté de la classification à la fin du Moyen Age. »

L’acédie souille donc notre coeur, il n’est alors plus capable de goûter combien le Seigneur est bon, cf. 1Pi.2:1-3). Puisque sa joie ne peut être ailleurs, il tombe dans l’ennui et l’abattement. Voici comment opère le paradoxe décrit par Évagre. Les idoles alors deviennent attirantes, la curiosité nous entraîne vers elles pour donner un peu de piquant à la vie devenue si fade, cf. Job.6:6.

Job 6:6 Peut-on manger ce qui est fade et sans sel? Y a-t-il de la saveur dans le blanc d’un oeuf?

Incapable de manger la nourriture solide qui rassasie l’âme (Hé.5:12-14), le fast-food mondain devient irrésistible. On anticipe, on s’excite, on effleure le plaisir mais cela conduit éventuellement, inévitablement, à l’irritabilité et à la depression parce que les idoles ne peuvent occuper de manière satisfaisante la place de Dieu.

Maintenant que l’acédie est débusquée et définie, nous pouvons établir une stratégie pour la combattre. Tout d’abord, voici un exemple biblique.

David qui avait été si zélé pour le Seigneur s’est laissé aller à l’acédie, au lieu d’accompagner son armée, il est tombé dans la paresse et l’oisiveté. L’ennui s’est emparée de lui sur sa couche et la curiosité l’a poussé à l’exploration, car le coeur de l’homme ne peut rester vide. Il n’avait pas internet pour aller voir des vidéos mais c’est encore mieux ; il savait où aller pour avoir une vue imprenable sur les femmes qui attendaient le soir pour aller se laver et c’est là que ses yeux ont remarqué Bath-Schéba.

2Samuel 11:1 L’année suivante, au temps où les rois se mettaient en campagne, David envoya Joab, avec ses serviteurs et tout Israël, pour détruire les fils d’Ammon et pour assiéger Rabba. Mais David resta à Jérusalem. 2 Un soir, David se leva de sa couche; et, comme il se promenait sur le toit de la maison royale, il aperçut de là une femme qui se baignait, et qui était très belle de figure.

Nous connaissons la suite de cette histoire porno, déterminons plutôt comment on peut combattre l’acédie avant qu’elle nous entraîne dans des péchés encore plus graves.

Comme je l’ai mentionné, le coeur de l’homme ne peut rester vide, Augustin rajoute que le coeur de l’homme a la forme de Dieu et que seul Dieu peut le remplir. David avait compris son problème, que dis-je, son péché. Il avait aussi saisi la solution à l’acédie qu’il s’empresse d’appliquer: la supplication pour ravoir un coeur purifié par le Seigneur, un esprit renouvelé dans des bonnes dispositions et une joie dans le service.

Psaumes 51:7 Purifie-moi avec l’hysope, et je serai pur; lave-moi, et je serai plus blanc que la neige. 8 Annonce-moi l’allégresse et la joie, et les os que tu as brisés se réjouiront. 9 Détourne ton regard de mes péchés, efface toutes mes iniquités. 10 O Dieu! crée en moi un coeur pur, renouvelle en moi un esprit bien disposé. 11 Ne me rejette pas loin de ta face, ne me retire pas ton esprit saint. 12 Rends-moi la joie de ton salut, et qu’un esprit de bonne volonté me soutienne!

La solution est en Dieu, bien entendu, comme le démontre David. Une fois qu’il a pris conscience de son péché, il le confesse et fait appel à la miséricorde de Dieu en lui demandant de changer son coeur. Il reconnut qu’il ne peut le faire lui-même :

Psaumes 51:1 O Dieu! aie pitié de moi dans ta bonté; selon ta grande miséricorde, efface mes transgressions;
2 Lave-moi complètement de mon iniquité, et purifie-moi de mon péché.
3 Car je reconnais mes transgressions, Et mon péché est constamment devant moi.
4 J’ai péché contre toi seul, et j’ai fait ce qui est mal à tes yeux, en sorte que tu seras juste dans ta sentence, Sans reproche dans ton jugement.Ps.51:5 Voici, je suis né dans l’iniquité, et ma mère m’a conçu dans le péché.
6 Mais tu veux que la vérité soit au fond du coeur: Fais donc pénétrer la sagesse au dedans de moi!

Les Écritures sont là pour notre instruction, suivons l’exemple de David et nous obtiendrons assurément la délivrance de l’acédie et de tous les vices à sa suite aux conséquences désastreuses. Le coeur alors purifié et rempli de l’amour de Dieu, il n’y reste plus de place pour l’acédie ni aucun autre péché.

Il s’agit ensuite d’entretenir la plénitude de Dieu par la prière continuelle et la méditation de sa Parole (eh oui, ça prend de l’effort et de la discipline qu’on n’a pas en nous-mêmes mais qu’on peut aussi demander à Dieu, cf. Philippiens 2:13). Après tout, on fait bien des efforts pour se laver, se nourrir, travailler, toutes des choses essentielles, mais combien plus important le soin à apporter à notre âme. Si on la néglige, c’est l’acédie qui se pointe à nouveau et l’histoire de David sur le toit va se répéter dans notre vie à la sauce du XXIe siècle et il a des sortes de sauces pour tous les goûts déplacés, Satan a son équipe de cuistots démoniaques qui y bossent 24 heures sur 24 …

Bon, j’en ai acédie !

août 3, 2019

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