Les jurons à connotation religieuse – sacrage

On entend encore sacrer occasionnellement au Québec, les visiteurs sont parfois étonnés de cette pratique inculte qui vient du temps où le niveau d’éducation des québécois francophones était inversement proportionnelle à leur pratique dans le catholicisme. Ils manquaient beaucoup de vocabulaire pour exprimer leurs émotions mais connaissaient toute la panoplie des termes utilisés lors des cérémonies religieuses. Quand l’irritation montait en eux, où bouillonnait déjà une colère latente par le trop grand contrôle exercé par l’église sur la vie quotidienne, un esprit blasphémateur les inspiraient à employer alors des termes empruntés de ce vocabulaire en les déformant de diverses manières pour manifester leur mécontentement et aussi leur manque total de crainte de Dieu par la bande. Aujourd’hui, la plupart des jeunes qui sacrent ne pourraient même pas donner la signification des termes qu’ils emploient, souvent en les déformant.

En résumé, dans un bâtiment d’église catholique, le tabernacle est une petite armoire où on entrepose les hosties consacrées dans un ciboire pour la prochaine eucharistie. Quand vient le temps de la sainte Cène (un autre nom pour eucharistie, mot qui vient du grec et signifie « action de grâce »), le vin est mis dans un calice. L’hostie représente le corps du Christ et le vin son sang, versé au calvaire. Par respect pour le Dieu que j’aime, vous n’entendrez jamais dans ma bouche les déformations de ces noms mis en gras ici qu’on transforment même parfois en verbe.

Voici le vocabulaire de sacres, jurons ou blasphèmes usuels :c

Ciboire:

(variante de sacres : caliboire, taboire) civoire XIIe ; en latin ciborium ; du grec Kibôrion, voulant dire « fruit du nénuphar d’Egypte »

Le ciboire est un récipient à nourriture, les mots de la même famille en latin ont rapport à la nourriture, cibaria, cibarium, cibatus et cibus se traduisent par nourriture, cibo est le verbe nourrir.

Catholicisme:

Ce mot courant a été repris par le catholicisme pour désigner un vase sacré à couvercle où sont conservées les hosties consacrées.

Aucune référence biblique de ciborium mais on rencontre dans la Vulgate des mots comme cibo Job. 20:21, ciborum De.18:8, cibaria Ge.42:33, cibus Es.9:5.

Hostie:

(variante de sacres : stie) hostia en latin ; victime,

Daniel 9:27 Il fera une solide alliance avec plusieurs pour une semaine, et durant la moitié de la semaine il fera cesser le sacrifice (hostia) et l’offrande; le dévastateur commettra les choses les
plus abominables, jusqu’à ce que la ruine et ce qui a été résolu fondent sur le dévastateur.

Catholicisme:

Puisque dans leur conception des choses, le sacrifice de Jésus est actualisé (non pas répété) dans l’eucharistie, le mot hostia en est venu à désigner la rondelle de pain azyme servant à l’Eucharistie (mot grec signifiant action de grâces,
ce que fit Jésus avant de donner le pain et la coupe à ses disciples). Ce pain sans levain est symbole de pureté, sans hypocrisie.

Luc 12:1 Avant tout, gardez-vous du levain des pharisiens, qui est l’hypocrisie.

Luc 22:1 La fête des pains sans levain, appelée la Pâque, approchait.

Calice:

(variante de sacres :  câlisse, câlife, câline, câlique) calix en latin ; coupe

Catholicisme:

Coupe sacrée où se fait la consécration du vin lors de la messe catholique.

Matthieu 26:27 Il prit ensuite une coupe (calix) et, après avoir rendu grâces, il la leur donna, en disant: Buvez-en tous;

Calvaire:

(variante de sacres : calvor, calvase) vient du latin calvaria : crâne et calva : boîte osseuse du cerveau. Comparer avec calve : chauve, 2Rois 2:23 la calvitie d’Élisée.

Le calvaire est une colline près de Jérusalem rappelait vaguement la forme d’un crâne, alors les romains l’avait surnommé calvaria.

Matthieu 27:33 Arrivés au lieu nommé Golgotha, ce qui signifie lieu du crâne (Calvariae en latin)

Tabernacle:

(variante de sacres : tabarnac, tabarnouche, tabarnan, tabarouette, taburn) vient du latin tabernaculum : tente, le suffixe -cul est un diminutif, comparer avec taberna : cabane, boutique, magasin, mot qui a donné en français taverne,
mais là, le rapport est plutôt avec le dieu Bacchus…

Catholicisme:

Dans la religion catholique, le mot tabernacle a été repris pour désigner une petite armoire fermant à clé, placée sur l’autel ou encastrée dans le mur du chœur d’une église et contenant le ciboire. Le rapport étant que Dieu avait demeuré dans une tente (un tabernacle) dans l’Ancien Testament et que maintenant Jésus (puisqu’il est Dieu lui aussi et qu’il est présent dans l’hostie) demeure dans le ciboire qui est serré dans le tabernacle. Voilà la logique catholique concernant le choix du terme.

Dans la Bible, le tabernacle désigne une tente simplement, 413 fois tabernaculum dans la Vulgate. 

Luc 9:33 Au moment où ces hommes se séparaient de Jésus, Pierre lui dit: Maître, il est bon que nous soyons ici; dressons trois tentes (tabernacula, pluriel de tabernaculum), une pour toi, une pour Moïse, et une pour Elie. Il ne
savait ce qu’il disait.

Luc 16:9 Et moi, je vous dis: Faites-vous des amis avec les richesses injustes, pour qu’ils vous reçoivent dans les tabernacles (tabernacula) éternels, quand elles viendront à vous manquer.

Autres termes religieux employés hors contexte

On peut aussi rajouter d’autres termes religieux utilisés hors contexte comme interjection, adjectif et même comme verbe: «esprit, christ (variante crisse, jesuscrisse), seigneur, bon dieu (variante bonyenne), mon doux (seigneur),  torrieu (tord à Dieu)».


La bienséance m’interdit de vous donner des exemples d’expressions courantes qui font chauffer les oreilles.

Ephésies 4:29 Qu’il ne sorte de votre bouche aucune parole mauvaise, mais, s’il y a lieu, quelque bonne parole, qui serve à l’édification et communique une grâce à ceux qui l’entendent. 30 N’attristez pas le Saint-Esprit de Dieu, par lequel
vous avez été scellés pour le jour de la rédemption.

Exode 20:7 Tu ne prendras point le nom de l’Eternel, ton Dieu, en vain; car l’Eternel ne laissera point impuni celui qui prendra son nom en vain.

Ces deux passages devraient suffire pour cesser d’employer comme interjection dépréciative des mots en rapport avec Dieu. Dieu n’apprécie sûrement pas ce manque de savoir-vivre, son Saint-Esprit en est attristé, il n’y a rien d’édifiant là-dedans. Si un chrétien s’exprime ainsi sans être troublé dans sa conscience, son état spirituel est alarmant.

En tant que chrétiens, nous sommes appelés à refléter Jésus-Christ. En sacrant, le chrétien mine son témoignage, perd sa crédibilité et s’attire le mépris des païens. Il s’abaisse à leur niveau en méprisant Dieu et les choses qui s’y rapportent. Les païens mépriseront aussi le Dieu des chrétiens qui est incapable d’inspirer le respect.

Le pardon est possible pour celui qui se repent du sacrage, comme on dit au Québec où c’est un sport national, au point où les espagnols ont surnommé « los tabarnacos» les québécois en vacances dans leurs contrées.

Marc 3:28 Je vous le dis en vérité, tous les péchés seront pardonnés aux fils des hommes, et les blasphèmes qu’ils auront proférés


Pr.28:13 Celui qui cache ses transgressions ne prospère point, Mais celui qui les avoue et les délaisse obtient miséricorde.


1Jn.1:9 Si nous confessons nos péchés, il est fidèle et juste pour nous les pardonner, et pour nous purifier de toute iniquité.

juin 16, 2019

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